Inondations en Europe : le changement climatique sur le banc des accusés
Le Vieux Continent a été le théâtre d’inondations record à l’automne 2024. Il fait peu de doutes que le changement climatique joue un rôle dans la multiplication de ce type de catastrophes naturelles. Pour les assurés et les cabinets de courtage partenaires de FM, ces événements rappellent l’importance cruciale de la résilience.
Il s’agit avant tout de comprendre le risque. Alors qu’une nouvelle année commence, les spécialistes FM font le bilan de 2024. Pour Angelika Werner, Directrice de la recherche sur les risques et la résilience climatiques, une préparation adéquate et des dispositifs d’alerte efficaces sont primordiaux pour garantir la résilience, d’autant plus que le paysage du risque évolue constamment.
Dans cet article, Davide Panosetti, Chargé de recherche principal de l’équipe Risques et résilience climatiques au Luxembourg, évoque les conditions météorologiques et les facteurs de changement climatique ayant provoqué des pluies historiques en Europe en 2024.
De la mi-septembre au début du mois de novembre, des précipitations record en Europe centrale et de l’Est, ainsi que dans le centre de l’Italie et en Espagne, ont entraîné le débordement de cours d’eau et d’importantes inondations. Les régions les plus touchées ont enregistré un niveau de pluie quasi historique en quelques jours seulement. Quelques exemples :
- Allemagne : dans la Saxe, les précipitations ont dépassé 150 mm pendant la période, avec des pointes à 200 mm dans certaines zones.
- Pologne : la ville de Wrocław a reçu 130 mm de pluie, et plus de 140 mm sont tombés le long de la Vistule.
- République tchèque : la région d’Ústí nad Labem a enregistré environ 160 mm de précipitations.
- Autriche : jusqu’à 180 mm de pluie sont tombés à Salzbourg et dans les environs. En Basse-Autriche, entre 300 et 350 mm se sont abattus en quelques jours, soit deux à quatre fois le niveau habituellement observé en septembre.
- Italie : dans certaines zones d’Émilie-Romagne, plus de 300 mm de pluie sont tombés en moins de 48 heures.
- Espagne : la région de Valence a subi des précipitations et des inondations record, la ville de Chiva ayant enregistré près de 500 mm de pluie en seulement 8 heures.
Ces épisodes pluvieux ont provoqué une crue rapide de grands cours d’eau comme la Vistule et l’Oder en Pologne, l’Elbe en Allemagne, l’Èbre et le Douro (Duero) en Espagne et le Danube en Autriche, entraînant des inondations généralisées. Par ailleurs, plusieurs localités du massif alpin ont connu les chutes de neige les plus précoces jamais enregistrées.
Des conditions météorologiques aux conséquences désastreuses
La première vague de conditions extrêmes, du 12 au 19 septembre, était principalement due à une zone de basse pression se déplaçant lentement. À son apogée, le front météorologique correspondant s’étendait sur près de 2 000 km. Du 12 au 17 septembre, il a stagné, prisonnier de deux zones stationnaires de haute pression. Cette configuration a provoqué des précipitations prolongées et intenses en Autriche, en Hongrie, en Pologne, en République tchèque, en Roumanie, en Slovaquie et en Slovénie. Une situation qui a poussé l’air à s’élever au-dessus des Alpes et des Carpates, tandis que la tempête puisait son humidité dans les eaux anormalement chaudes de la Méditerranée et de la mer Noire, intensifiant ainsi les pluies.
Du 17 au 19 septembre, la traîne de ce front météorologique s’est déplacée jusqu’au centre de l’Italie. À la différence des conditions extrêmes en Europe centrale et de l’Est, de violents orages ont été à l’origine d’une grande partie des précipitations observées dans la Botte. La température anormale à la surface de la mer, en Adriatique en particulier, a joué un rôle important dans le développement et l’intensification des orages. Après avoir subi des inondations catastrophiques en mai 2023, la région de l’Émilie-Romagne a une nouvelle fois été durement touchée.
De la même façon, la deuxième vague de conditions extrêmes, qui a frappé l’Espagne fin octobre-début novembre, avait pour principale cause météorologique un système dépressionnaire appelé « goutte froide ». Situés entre l’Atlantique et la Méditerranée, l’est et le sud du pays sont particulièrement exposés à ce phénomène. En automne, l’air froid de haute altitude balaye la Méditerranée dont la température demeure chaude, provoquant une dégradation rapide des conditions météorologiques et de fortes pluies.
La topographie complexe de l’Espagne a exacerbé localement l’intensité des précipitations. Le soulèvement orographique généralisé depuis la Meseta centrale et les monts Ibériques a accéléré l’élévation de l’air humide de la Méditerranée, et les vallées étroites ont « piégé » des orages isolés pendant plus longtemps, provoquant une accumulation de pluies localisées.
Impact du changement climatique sur les inondations
Selon les dernières projections climatiques mondiales et régionales, il est fort probable que les tendances actuelles provoqueront à l’avenir des épisodes pluvieux plus intenses et plus fréquents dans différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre avec l’augmentation des températures à travers le monde. Le risque d’inondation est donc amené à augmenter.
De plus, la Méditerranée se réchauffe à un rythme plus élevé que la moyenne mondiale, ce qui explique les volumes de pluie exceptionnels déversés par la tempête Boris en septembre et la goutte froide fin octobre-début novembre. Si les phénomènes climatiques de ce type ne sont pas nouveaux, ils se produisent désormais dans une atmosphère plus chaude donc potentiellement plus humide, ce qui rend les précipitations plus intenses que par le passé.
Enfin, le réchauffement accéléré de l’Arctique par rapport aux latitudes moyennes a notamment pour conséquence d’affaiblir le courant-jet et de le rendre plus sinueux. Or l’ondulation accrue de ce courant peut entraîner la persistance des conditions météorologiques, donc des périodes prolongées d’un même type de temps, qu’il s’agisse de vagues de froid, de canicules ou d’épisodes pluvieux intenses. Les inondations de fin octobre-début novembre en Espagne en sont l’illustration.
Solutions pour se prémunir contre les risques climatiques
Les inondations de l’automne 2024 en Europe et les tendances climatiques plus globales soulignent la nécessité d’adopter une approche complète et innovante pour s’adapter à l’évolution des catastrophes naturelles. Des investissements récents dans des dispositifs anti-inondation ont permis de limiter l’impact de certains événements, notamment dans des grandes villes comme Vienne.
FM met à la disposition de ses assurés et cabinets de courtage partenaires des outils permettant de comprendre ces risques et de s’y préparer. Ses produits de résilience climatique incluent notamment l’Étude de risques climatiques, qui facilite la compréhension des risques actuels, ainsi que l’Étude d’impact du changement climatique, un outil prospectif. C’est en tirant les leçons de ces événements que nous pourrons protéger les biens et le tissu économique plus efficacement contre les risques climatiques.